Les vagues lui parlèrent et lui dirent ceci. Les vagues lui chuchotèrent sournoisement qu'il était trop tard. Qu'Elle allait venir. Qu'Elle allait parler. Qu'Elle allait penser. Qu'il ne serait plus jamais seul. Qu'Elle serait là, jour et nuit à crier. À tempêter. Qu'il ne pourrait pas y échapper. Qu'il vaudrait mieux qu'il parte. Maintenant. Elle serait bientôt là. Le temps passait, elle se rapprochait, posant de temps à autre son regard mauvais sur une potentielle nouvelle victime. Elle était déjà là, endormie. Elle se réveillerait. Elle avait déjà choisit. Le choix avait été dur mais il était fait. C'était lui. Lui, le suivant. Et rien ne servirait de pleurer des larmes, aussi amères soit - elles. Rien ne servirait de lutter. Elle était bien plus forte. Depuis le temps qu'elle attendait. Elle savait. Elle frapperait. Juste et droit. Elle ne se raterait pas. Pas cette fois. Il fallait fuir ou lutter. C'était à lui de choisir. Être lâche ou se retourner et la regarder dans le blanc des yeux. Affronter sa peur ou la laisser gagner. Car de toute façon elle le retrouverait. Elle le coincerait et elle aurait raison de lui. Peut - être serait - il courageux, peut - être tenterait - il de lutter, peut - être aurait - il l'illusion qu'il pourra la vaincre. Mais ce ne serait qu'une pauvre illusion qui serait bien vite réduite à néant. Elle gagnait toujours de toutes manières, pourquoi combattre lorsque le combat est vain ? Pourquoi s'obstiner. Elle était bien trop forte. Elle était le vice. Le mal qui vous ronge. La Maladie. Avec un grand m.
Les vagues lui avaient dit.

Sourire Caméléon ouvrit les yeux. Face à lui le soleil mourait lentement, laissant sur son passage de longues traces sanglantes, engloutit par la mer cruelle. Il se souvenait être sorti, avoir vaguement marché, sans vraiment regarder où il allait, puis plus rien. Le trou noir. Maintenant il était là. Les quatre pattes bien campées dans le sable, le ressac des vagues venant lécher le bout de ses pattes avant de s'en retourner vers l'océan.
Le vent lui parla, comme il le faisait à chaque fois, mais ses paroles furent étouffées par les cris de la mer, elle hurlait, hurlait comme une forcenée son désaccord et déjà l'on pouvait voir les vagues enfler sous sa colère et aller se fracasser contre le flanc de la falaise dans un éclat de rage.
Les yeux du guerrier papillonnèrent, se posant sur les empreintes, ses propres empreintes, qui semblaient indécises d'ailleurs, qu'il avait fait en venant, puis revenant sur l'horizon rougeoyant sous l'astre couchant.
Il se souvenait des voix, des voix qui sifflaient, crachaient, grondaient à ses oreilles mais malgré tous les efforts du mâle il ne se rappelait pas distinctement ce que disaient ces voix. C'était comme sur une radio mal réglée, parfois un mot, comme sortit de nul part, jaillissait puis c'était à nouveau comme flou et haché.
Une nouvelle vague vînt s'échouer à ses pieds pour repartir de nouveau vers les flots agités.
Il ne savait pas. Pas encore.