HISTOIRE

“ non est un bien joli mot, encore faut - il savoir le dire en premier. ”

Il y a des choses dans la vie que l'ont ne peut pas contrôler. Le temps. L'âge, qui s'y lie étroitement. La vie. La mort. Les sentiments. De sentiments tout simples, bénins comme la joie, ou la peur, aux plus complexes comme la haine ou l'amour.
Il y eut, pendant un court laps de temps, un amour, futile et fragile, entre deux êtres passablement limités. L'une portait le doux nom de Souhait des Coccinelles, jeune reine de la Plage, une agréable minette avec de jolies formes fines au pelage tout de crème et de noire. Une mignonne petite siamoise aux iris bleues indigo. Malheureusement la nature voulu que l'intelligence et la raison ne fut pas son point fort et qu'elle virevoltait d'un mâle à l'autre, enchainant portée sur portée et se désintéressant complètement de sa progéniture une fois celle ci mise au monde. L'autre, portait le nom de Bois de Frêne, un guerrier du Volcan débordant d'une folle ambition, bien trop élevée par rapport à ses propres capacités. Ce dernier était brun rayé, tout de muscles et sans aucun jugement, ses yeux ambrés brillant constamment de cette lueur mauvaise et sournoise. La nature voulu donc que les deux se rencontrent, s'aiment le temps d'une nuit et se séparent le lendemain, se fichant complément de savoir si oui ou non leur relation était vue comme illégale. Bien entendu la jeune reine de la Plage fini par se rendre compte qu'elle attendait, pour la énième fois, une portée et évita facilement toutes questions étant donné qu'aux yeux du clan cette dernière n'avait pas une réputation des plus propres.
Il arrive parfois, que de l'union de deux personnes " pourries " de l'intérieur, naissent des êtres qui, contrairement à leurs géniteurs n'aient pas cette tare dans le sang, ou si peu. Et c'est donc de cette union que naquirent, un jour de printemps, Petit Caméléon et Petite Sirène, deux chatons en pleine santé. Le premier, le mâle, était le portrait de sa mère, même robe, même stature quoiqu'un peu plus trapue, même démarche aérienne et mis à par ses grand yeux verts d'eau et son sourire d'ange il ressemblait énormément à sa génitrice. La seconde, une femelle, était, de son côté, beaucoup plus pataude et musclée, son poils tigré mi long s'emmêlait constamment, laissant apparaitre des paquets de nœuds qui formaient de petits épis et donnait à la petite femelle une allure comique mais qui avait pour effet d'agacer sa mère au plus haut point.
Leur enfance ne fut pas des plus heureuses, leur mère se désintéressant tout à fait d'eux, les confiant le plus souvent aux autres reines de la pouponnière, préférant faire les yeux doux à tout ce qui bougeait dans le camp.
Un soir, Souhait des Coccinelles leur apprit sans vraiment réfléchir que leur père n'était pas d'ici, mais d’un autre clan. Et que par conséquent la relation quelle avait entretenu avec lui était bannie et que les deux chatons n'appartenaient ni entièrement au Clan de la Plage ni entièrement au Clan du Volcan. Petite Sirène se mit à bouder dans son coin, grommelant qu'elle aurait préféré ne jamais le savoir, Petit Caméléon lui se contenta de fixer sa mère avec ses grands yeux verdâtres et déconcertants, une petite voix lui chuchotant méchamment à l'oreille de se taire, de ne pas poser de question, tandis qu'une autre l'incitait d'une voix mielleuse d'assouvir sa curiosité.

« Pourquoi ? »

Demanda t – il de sa petite voix fluette.
Souhait des Coccinelles sembla ne pas comprendre tout de suite que son fils s'adressait à elle, et une lueur perdue traversa ses prunelles bleutées tandis qu'elle regardait le chaton avec un air de profonde réflexion imprimé sur ses traits délicats.

« Non. Pas de pourquoi. Parce que. C'est comme ça Petit Caméléon. Ne pose plus de question. »

Parce que. C'était toujours la réponse que la reine crème adressait à son petit des que celui ci avait l'audace de soulever ne serait ce que le moindre point d'interrogation. Mais il avait fini par s'y habituer, il avait fini par comprendre. Certaines personnes étaient comme cela ; stupides, stupides, stupides. Et malgré toute la bonne volonté du monde on ne pouvait pas les changer. Alors le chaton lui fit son plus beau sourire, relevant en une mimique charmeuse les coins délicats de ses lèvres. Un instant les voix dans sa tête hurlèrent, allumant un éclat mauvais dans les prunelles vertes du chaton, puis, après avoir miroité faiblement, l'éclat s'éteignit. Comme une bougie que l'ont souffle.
Il souriait. Innocent.