Il faisait un temps exécrable, et ce depuis tellement longtemps. Des lunes au moins. Astre de Magellan était lieutenant depuis quelques temps maintenant. Il s’y était fait, et heureusement pour lui, ses camarades de clan aussi. La plupart du moins. Mais heureusement pour le matou blanc, être autoritaire était comme tout naturel chez lui. Les quelques récalcitrants qui restaient ne le demeureraient pas très longtemps. Peut-être qu’il y a une lune leur lieutenant était toujours un « nuage », mais maintenant c’était différent. Et en quelque sorte, sa nomination pour seconder Etoile de la Dignité l’avait vieilli prématurément. Il avait muri.
Comme si la nature voulait le mettre à l’épreuve, la tempête qui frappait depuis si longtemps lui amenait toujours plus de problèmes. Il fallait gérer avec précaution les patrouilles, prendre soin des blessés qui étaient toujours plus nombreux dans la tanière du guérisseur, être très prudent en sortant du camp : personne n’était à l’abri d’une tempête de sable ou d’un arbre qui s’écroulait. Astre du Magellan le savait mieux que personne. Il y avait perdu toute sa famille, son frère, son oncle, et même Etoile de la Sirène. 
 
La journée était largement avancée et Astre de Magellan était exténué. Une fois toutes les tâches que lui offrait son grade de second, il prit un instant pour se poser devant la tanière des guerriers, une proie rachitique entre les pattes. Il croqua une bouchée, deux, c’était fini. La mauvaise saison était là, et le peu de proies qui n’étaient pas terrées dans leur trou pour l’hiver étaient terrées dans leur trou à cause de la tempête. 
Lorsque soudainement, Etoile de la Dignité fit son apparition, son lieutenant sut que quelque chose n’allait pas. Le fixant de ses yeux bleu clair, il les écarquilla quand il lui annonça vouloir le voir seul à seul dans sa tanière, le plus vite possible. Que se passait-il ? Quelque chose de grave ? Un nouveau blessé par les bourrasques de vent ? Quelqu’un était tombé de la falaise ? 
 
Astre de Magellan se dressa sur ses pattes presque immédiatement après que son meneur soit rentré dans son antre et se dirigea d’un pas pressé vers lui. Il promena son regard sur les tanières et les chats qu’il croisait, pour voir qui manquait à l’appel, si quelqu’un était susceptible d’être en mauvaise posture. Inquiet, il pressa le pas et pénétra dans la tanière sombre, sentant un regard posé sur lui. Il se tourna pendant une fraction de seconde pour constater que c’était Reine des Neiges. Qu’est-ce qu’elle lui voulait ?
Il attendit quelques secondes supplémentaires pour que ses yeux cristallins s’habituent à l’obscurité avant de demander, l’inquiétude trahissant dans sa voix :
Étoile de la Dignité… *pause* Que se passe t’il ? Une catastrophe ?