histoire.Un miaulement strident retentit depuis la pouponnière. Le guérisseur, réveillée en sursaut, s'y précipita immédiatement, sachant pertinemment que la nuit qu'il n'avait pu qu'entamer, serait longue. Une jeune femelle était allongée sur le flanc, suffoquant et retenant des cris de douleur. En raison de son jeune âge, le travail serait plus difficile, plus long et plus douloureux. Sa mère était présente et essayait malgré tout de rassurer sa fille souffrant le martyr. La petite chatonne sera nommée par sa grand-mère, dont la fille mourut ce soir-là. Il n'y avait plus que sa grand-mère d'ailleurs. Sa mère n'avait que treize lunes, elle était trop jeune, et avait péri d'épuisement. Son père, lui, ne s'était jamais montré. Il appartenait à un autre Clan, ou il se cachait parmi ses camarades du Volcan, trop honteux d'avoir tué une femelle qui l'aimait et d'avoir abandonné sa fille sans avoir voulu l'assumer.
*
«
A partir de ce jour, tu te nommeras Nuage de la Galaxie, et ce jusqu'à ce que tu sois nommée guerrière. Ton mentor sera Astre de Magellan. »
Le jeune guerrier semble surpris mais s'approche de la petite chatonne maintenant novice et pose son museau sur le front de cette dernière. Ils se sourient mutuellement, et les exclamations fusent dans l'assemblée. Là-voilà apprentie de l'ancien novice du chef.
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« Nuage de la Galaxie, écoutes-moi un peu ! Tu ne veux rien comprendre ! Il va bien falloir à un moment que tu apprennes à te battre, et si tu ne le fais pas pour toi, fais-le pour ton Clan ! »
Nuage de la Galaxie a maintenant dix lunes, et après quatre lunes de refus, elle va bien devoir apprendre à se battre un jour ou l'autre.
« Tu ne comprends pas toi non plus ! Ça me dégoûte ! Je ne peux pas blesser un de mes semblables !
- Et si on se fait attaquer, un jour ou l'autre, hein ? Comment tu feras ? Si tu refuses de te battre, je refile ton entraînement au guérisseur et tu éplucheras des plantes tout le reste de ta vie dans ta grotte, sans pouvoir avoir ni de compagnon, ni de chaton ! C'est ça ce que tu veux ? »
La réponse de son mentor la frappe de plein fouet. Guérisseuse, c'est la dernière chose qu'elle veut être. Elle ne sera jamais heureuse si elle le devient, elle en est certaine.
« Tu n'as pas le droit ! Tu n'as pas le droit de m'influencer, non, de me contraindre dans mes choix ! »
La novice déteste être influencée, mais elle sait qu'elle n'aura pas le choix, et les larmes montent à ses yeux.
« Ecoute... Je sais que c'est dur, pour toi, comme pour moi... Nos camarades se posent des questions, et déjà que pour eux je ne mérite pas ma place de lieutenant, si en plus je ne t'entraîne pas...
- A tuer ?
- A te défendre, et à défendre le Clan ! Bon. Cette conversation est terminée. Demain, tu n'auras pas le choix, je commencerai ton entraînement au combat. »
Il fit demi-tour et rentra au camp, la laissant plantée là. Elle devait se résigner, pour la première fois de sa vie. Elle n'avait plus le choix.
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Echo de la Galaxie venait d'être nommée guerrière. Elle portait un superbe nom, et était maintenant une jeune femelle pleine d'élégance. Sa grand-mère était toujours à ses côtés, et elles dormaient dans des litières proches. Elle lui ressemblait beaucoup, physiquement comme moralement, si bien qu'elle aurait pu être sa fille, et non sa petite-fille. En soi, la jeune femelle la considérait comme sa mère.
Ce jour-là, la jeune guerrière blanche et tigrée patrouillaient avec d'autres camarades à la frontière avec le Clan de la Jungle. Lorsqu'ils s'apprêtèrent à rentrer vers le camp, une patrouille ennemie surgit, et attaquèrent les félins du Volcan. Elle resta plantée lorsqu'un matou massif lui sauta à la gorge. Elle n'arriva pas à se défendre tout de suite, mais par instinct elle finit par frapper, griffer, mordre. Les trois chats qui les avaient attaqué sans raison furent vaincus, et elle avait bien amoché celui contre lequel elle s'était battu. Le sang de son adversaire s'était mélangé avec le sien sur son pelage. Lorsqu'ils rentrèrent, elle alla directement se coucher dans un coin de la tanière des guerriers, n'osant même pas lécher le sang qui avait séché sur ses poils. Elle n'avait mal nul part, ne ressentait plus rien que du dégoût. Sa grand-mère vint la toiletter et la rassurer et celle-ci se laissa entraîné dans un sommeil perturbé de rêves sanglants.
Elle grandit avec la peur de revivre ce qu'elle avait toujours redouté. Maintenant elle essayait juste d'oublier, et elle cherchait juste à être heureuse en sachant pertinemment qu'elle ne pourrait jamais l'être véritablement.