J'aime bien les grands espaces. Les endroits où on voit jusqu'à très loin là-bas. Bizarrement, la plupart se planqueraient aussitôt en se voyant à découvert comme ça. C'est vrai qu'ici, à part des fleurs et de l'herbe, y a pas grand-chose. Voire carrément rien du tout même. Nulle part où se cacher. Mais moi je suis là pour voir du pays.
Les nuages, là-haut, ils me donnent envie de dormir. Mes pattes se mettent en route toutes seules, sans que je ne leur demande quoi que ce soit. Elles savent que si je reste trop longtemps sur place je vais finir par somnoler. Mon passage crée un petit sillon derrière moi. C'est rigolo. J'hume les effluves environnantes: je ne sens aucune odeur familière. Je poursuis mon ascension; j'entre dans le monde de mes pensées. Ce monde horrible. J'aime pas ça. Et après? Qu'est-ce que je vais faire? Rentrer? Il n'y a rien à faire au camp. Chasser? Je n'ai pas la volonté.

Et puis je ne me rends pas compte que je suis sur le point de piétiner la queue d'un malheureux félin qui dormait-là et qui n'avait rien demandé non plus.

Je roule, je roule, je roule… C’est marrant de rouler. Tout bouge autour de toi. Mais genre comme un tourbillon. C’est trooop marrant. Alors je roule encore, je me mets à rigoler comme une abrutis. Est-ce que les chats peuvent être drogués ? Parce que là j’ai l’impression d’être dans un état second. Je n’aurai peut-être pas du manger ces fleurs tout à l’heure…

Tu sortais à peine du camp que, déjà, tu te mis à courir en hurlant. Oui, tu ne pensais pas qu’il y avait des chats dans la jungle qui essayait de chasser. Tu es un peu bête très chère Idylle. Après quelques minutes de course tu t’arrêtas devant un bosquet de fleur étrange. Et comme tu es irresponsable et pas vraiment futé, enfin si tu l’es mais tu le caches bien quoi, tu arrachas une fleur et l’avalas tout rond.

Ouai c’est sûrement ça. Et pourquoi je roule déjà ?

Après avoir avalé la fleur, tu te rendis compte que la terre tournait autour de toi. Prise d’un fou rire, tu ne vis pas le tronc d’arbre coupé, et tu trébuchas.

Ah ouai…. Bon bah je vais rouler, rouler, rouler encore jusqu’à ce qu’un truc m’arrête.

Cela faisait donc plusieurs minutes qu’Idylle de Juin roulait. En rigolant comme une folle. Puis lorsque le terrain fut plus plat, elle perdit de l’élan et s’arrêta. Elle ne savait pas vraiment où elle était, tant sa tête tournait. Et c’est dans un dernier rire qu’elle sombra dans l’obscurité de l’inconscience.

Elle fut réveillée par un chat qui, sans le vouloir, lui avait marché sur la queue. Elle leva la tête, totalement déboussolé et dit d’une voix niaise :

« Bienvenue dans le Pays des Rêêêveeess ! »